Chapitre troisième : les Armures
La conception des armures est un travail on ne peut plus gratifiant, mais très difficile. Vous commencerez sans nul doute par faire des armures de taille générique, avant de donner dans le sur-mesure. Quoi qu'il en soit, les matières premières sont utilisées en grande quantité dans ce genre de travaux.
Les armures métalliques les plus courantes sont les armures de mailles. Il vous faudra confectionner avec soin des anneaux ouverts, avec du fil épais en acier, rigide. Chaque anneau doit être de même taille. Une fois le nombre d'anneaux requis en votre possession commence l'assemblage : resserrez les anneaux pour les fermer, puis faites un point de soudure à l'aide de l'extrémité d'une barre d'acier fine portée à blanc.
Les armures de plate sont un agencement de plaques d'acier rivetées sur une pièce de mailles, du moins pour le plastron. Tous les emplacements suivent le même schéma général. Il vous faudra travailler des plaques d'acier pour leur donner la forme voulue. Les pièces basiques se composent de peu d'éléments.
Les pièces d'armure élaborées sont, par contre, difficiles à réaliser. Toute pièce d'armure de qualité ne doit en aucun cas gêner les mouvements du porteur. En général, ce sont des armures faites sur mesure. Je vais procéder par pièce :
Un plastron de bonne qualité peut revêtir différentes formes. La première est la cuirasse, en deux pièces : dos et torse. La jonction entre les deux se fait par des sangles de cuir. On peut scinder ces deux parties. Ainsi, un haut de cuirasse un peu plus ample que la normale et une protection d'abdomen classique, en reliant la partie supérieure et inférieure par des sangles de cuir donne au porteur la possibilité de plier le torse. Quoi qu'il en soit, il vous faudra prévoir des emplacements pour les sangles. Il ne s'agirait pas de blesser le chevalier ou soldat à qui le plastron est destiné, il faut donc intégrer des emplacements pour la base des sangles, en creux dans l'acier, et fixer les lanières par des rivets n'affleurant presque pas à l'extérieur de l'armure. Reliez les plaques de métal entre elles et donnez la forme général par torsion en douceur, à la pince. Puis travaillez la forme, dans le cas de plastrons complexes, en taillant d'abord grossièrement l'acier à la tenaille, puis en le travaillant au marteau jusqu'à obtenir la forme désirée. Les bords doivent être doux et arrondis afin de ne pas blesser le porteur.
Les épaulières doivent, dans le cadre d'une commande complète, s'agencer parfaitement au plastron. Le plastron contiendra donc des sangles destinées à ces pièces supérieures. Les épaulières en elles même doivent être forgées de manière à pouvoir s'adapter au creux du cou, pour ne pas brider les mouvements, et assez mobiles pour les rotations. Prévoyez donc qu'elles reposent non sur l'arrondi de l'épaule, mais sur la clavicule et la partie supérieure, laissant un espace libre entre le bras et le métal. Travaillez le métal pour lui donner une forme arrondie, polyvalente. Et allégez la protection, le but étant de protéger tout en se battant il vous faudra affiner vos plaques de métal, qu'elles n'entravent pas les mouvements des soldats. Etirez les plaques à l'aide de vos pinces, martelez les jusqu'à obtenir l'épaisseur désirée. Reliez les plaques entre elles, à rouge, et faites disparaitre la jonctions. Enfin, travaillez sur les arrondis de votre enclume pour donner la forme adéquate aux épaulières, puis ménagez un emplacement pour fixer les sangles, et attachez ces dernières avec des rivets d'acier.
Montons encore : les casques. Les casques de meilleure qualité sont montés sur cuir et camail de mailles. Il existe différent types de casques. Les cervelières protègent la nuque et le crane, vous pouvez y adjoindre un nasal, qui la stabilisera. Viennent ensuite les chapeaux d'acier, utiles par leurs larges bords contre les archers. Une amélioration notable que l'on puisse y ajouter est un demi-masque d'acier à nasal. Ce type de casque est à conseiller aux archers et arbalétriers, contre leurs homologues adverses, et le demi-masque protègera le visage des éclats de bois. Type de casque le plus intéressant maintenant : les heaumes. Ils protègent l'intégralité de la tête. Tous ces types de casques se travaillent sur des plaques d'acier auxquelles il faut donner une forme cylindrique. Notez que les heaumes à bassinet vous demanderont un travail supplémentaire : il faudra créer le rabat et l'articuler de manière à ce qu'il soit stable, fonctionnel et efficace.
Passons ensuite aux jambières. De vraies jambières ne couvrent que la partie antérieure des cuisses. Il s'agit de simples plaques de métal, travaillées en forme pour s'adapter à la forme de la cuisse, et sanglées à la ceinture puis fixées par une sanglé à l'arrière du genou. Vous pouvez cependant y adjoindre une protection de la partie postérieure de la cuisse, auquel cas cette seconde partie sera fixée à la ceinture, et à la partie antérieure de la jambière, toujours par des lanières de cuir. C'est une pièce aisée à réaliser dans sa forme générale.
Les pieds ont eux aussi leur protection. Une plaque de métal couvrira le coup de pied, une autre le tibia. La plaque de tibia devra pouvoir s'agencer sur celle du coup de pied : concevez la en arrondi, pour ne pas bloquer la cheville. Ce type de protections est directement fixé sur des bottes de cuir, ne prévoyez donc pas de sanglage.
Enfin, la pièce surement la plus intéressante à fabriquer : les gantelets. Toutes les pièces seront rivetées sur un gant de cuir et mailles. Une plaque de protection couvrira l'avant bras, faites la ample pour conserver une liberté de mouvement. La protection de la main est composée d'une plaque, et surtout des protections de la partie supérieure des doigts. Ces protections doivent être articulées, ce qui vous donnera un travail d'orfèvre, chaque phalange recevant sa pièce à part. Après avoir façonné chaque partie, fixez les rivets joignant les phalanges entre elles. Vous devrez être minutieux, les articulations ne doivent pas gêner les mouvements des doigts. On peut adjoindre à un gantelet des pointes, pour blesser l'adversaire d'un coup de poing, ou une chaine reliée à l'arme. Dans le cas de la chaine, prévoyez un arceau d'acier inférieur fixé sur une plaque. Un tel gantelet doit avoir une protection d'avant bras serrée, proche du corps. Fixez la chaine à l'arceau, le dernier maillon étant un mousqueton à vis. Puis modifiez l'arme : retravaillez le pommeau, si c'est une épée, pour lui donner la forme d'un arceau. Dans le cadre d'une hache ou d'une masse, ajoutez au manche une pièce de métal à arceau.
Une pièce d'armure importante reste le bouclier. Le plus basique est en bois, il vous faudra des planches. Cerclez ces planches d'acier, et rivetez les entre elles. Puis, à l'intérieur du bouclier, fixez deux sangles de cuir et une poignée d'acier, afin de pouvoir le tenir. Les boucliers en métal demandent un travail particulier. Joignez les plaques de métal entre elles, et faites les fixations de la même manière. Mais l'essentiel sera d'alléger au maximum le bouclier, donc affinez les plaques au possible, ne mettez pas d'excédent de métal.
Chapitre quatrième : les Armes
Une belle part du travail de forgeron : les armes. Oublions le fait que ce soit des objets de mort, et retenons qu'une bonne arme est aussi une belle arme, un bel ouvrage, un art. Nous commencerons par la base, c'est à dire les dagues et les épées.
Les dagues comme les épées sont composées de quatre parties : la lame, bien sur, puis la garde, la poignée et le pommeau. Chacune est forgée séparément, puis l'arme est assemblée. Pour forger une lame, il vous faudra marteler le métal à rouge, puis à blanc, d'abord pour lui donner la forme générale, puis pour affiner la silhouette de l'arme et lui donner sa forme finale.
Il existe différentes qualités d'armes, les lames médiocres sont en fer, donc cassantes, mais le plus souvent vous serez amenés à forger de l'acier, trempé. Reportez vous au chapitre correspondant pour savoir comment l'obtenir.
La poignée et la garde sont généralement faites d'une seule pièce, à l'aide d'un moule. Ce bloc est percé. En effet, quand vous façonnerez une lame, faites de la partie inférieure une barre relativement fine, fort pratique pour tenir la pièce avec vos pinces mais surtout essentielle pour la finition. Une fois la lame forgée, insérées cette barre dans l'orifice prévu dans la garde et la poignée, puis la partie de la barre qui dépasse de la poignée devra être travaillée. Équilibrez d'abord l'ensemble en le plaçant correctement, et soudez la base de la lame à la garde à l'aide d'une barre portée à blanc. Ensuite, chauffez la partie qui dépasse de la poignée et l'extrémité de la poignée. Puis façonnez cette partie de la forme désirée pour en faire le pommeau, finissant ainsi de souder la lame au reste de l'arme. Enfin, prenez du cuir poinçonné et rivetez le à la poignée à l'aide de petites agrafes, ou plaquez le sur l'arme légèrement chauffée et cousez les deux parties du cuir.
Les haches de guerre se forgent sur le même schéma que les haches de bûcheron ou les pioches, à cela près que la lame est souvent incurvée, voire à double tranchant. Il vous faudra l'équilibrer selon le type : soit une arme très puissante et déséquilibrée, pour se servir de la force d'inertie, soit une arme parfaitement symétrique et par conséquent agile.
Les masses sont elles aussi construites sur le modèle des pioches. Le travail de la tête reste cependant intéressant. Vous pouvez faire une tête sphérique simple, un marteau de guerre lourd (et auquel cas la tête sera un pavé d'acier relativement gros). Le plus intéressant reste de faire une masse à pointes, en intégrant des clous à une tête sphérique, ou une masse à ailettes, le plus dur. Une masse à ailettes a en général une tête hexagonale, que vous travaillerez au burin puis à la meule pour transformer les arêtes en lames relativement épaisses.
Pour un certain confort, vous pouvez fixer des lanières de cuir au manche, facilitant la prise.
Chapitre cinquième : Objets Spéciaux
Si vous maîtrisez les méthodes exposées précédemment, vous pourrez forger des objets de rare qualité.
Les armures décorées par exemple. Il vous faudra des composants onéreux, comme l'or, l'argent, et des pierres précieuses. Il est à la portée de n'importe quel forgeron de faire une armure d'apparat inutilisable au combat, belle certes mais inefficace et lourde. Par contre, une armure complète, décorée, et d'excellente facture pour un combattant est difficile à réaliser. En effet, il faudra éviter d'alourdir l'ensemble. Vous devrez donc apprendre, non à ajouter mais à incruster les décorations, les intégrer naturellement à l'ensemble. Ceci ne peut se faire que par la pratique. Et quelques astuces : une armure décorée ne l'est qu'en filigrane. Un ajout ne doit jamais déséquilibrer l'ensemble. Un armurier vraiment doué se servira même des ajouts pour apporter une meilleure mobilité et solidité à l'ensemble.
De même, certaines armes sont très prisées : les armes scintillantes. Vous pouvez les décorer, mais leur principale qualité réside dans la particularité de leur alliage. En effet, il vous faudra des gemmes pour forger de telles armes. Brisez ces gemmes en fins éclats, en poussière quand c'est possible, et intégrez les à la fonte de votre acier. L'alliage ainsi obtenu augmentera leur efficacité. A noter que s'il s'agit de poudre de diamant, votre arme pourra traverser n'importe quelle armure pourvu qu'elle ne soit pas en mithril.
Je ne ferai que citer les armes et armures légendaires, ne connaissant par leur composition. Vous devrez trouver les notes de leurs premiers forgerons par vous même, et de tels objets mettront sans doute à très rude épreuve vos talents et votre maîtrise.
Post-Face :Vous voila donc armé pour entrer dans votre forge et prendre commande. Jeune confrère, je vous souhaite bonne chance dans la dure profession qu'est la notre. J'espère que mes modestes conseils vous auront été profitables, et que vous gravirez les échelons de la notoriété de notre corps de métier.